Le quotidien L'Equipe a consacré un article vendredi dernier au président tourangeau, à lire ci-dessous :
Jean-Marc Ettori, tête à clash
En conflit avec de nombreuses personnes, le président du Tours FC, personnage torturé et coutumier des coups de sang, ne semble pas s'épanouir dans le milieu du football.
Il y a quelques années, Jean-Claude Plessis, alors président de Sochaux, avait avoué à Jérôme Leroy : « Je t'avais recruté pour vérifier que tu étais aussi fou qu'on le disait. » S'il ne fut pas possible de rencontrer Jean-Marc Ettori et sa folie supposée, pour des raisons de planning, l'interview par téléphone tint toutes ses promesses. Une conversation de deux heures vingt, avec une possession de parole pour le président tourangeau identique à celle du Barça, de longues digressions, beaucoup, une incessante nécessité de se justifier et, au final, le sentiment d'un homme torturé aux sorties médiatiques volcaniques, baroques, parfois vulgaires.
La dernière en date, en réaction à des insultes de Laurent Agouazi, ancien joueur de Tours (1), a choqué jusqu'à ses proches. Sa fille Caroline n'y a d'abord pas cru : « Je pensais même que c'était le joueur qui avait parlé ainsi. Avec mes deux autres soeurs, on était consternées et lui ne savait pas pourquoi il avait dit ça. » Ce qu'il confirme aujourd'hui : « Je n'ai pas dormi pendant deux nuits. Je le regrette profondément, je n'aurais pas dû parler ainsi de sa maman. »
Ce n'est pas son premier conflit, probablement pas le dernier, et même s'il a du mal à l'admettre, il est souvent dans les embrouilles. Celui qui sauva le club d'une relégation administrative en DH en juillet 2013 reconnaît quelques erreurs pour mieux éreinter ceux qui ne travaillent plus avec lui. Olivier Pantaloni, son premier entraîneur ? « Le capitaine du Costa Concordia, il a abandonné le bateau. » Marco Simone ? « Pas ma tasse de thé. Je ne savais pas qui c'était, il a été viré trois fois avant de venir à Tours. » Jean-Luc Ettori, son consultant lors de la reprise du club ? « Une erreur de casting, une catastrophe au niveau de la gestion. » L'ancien gardien de Monaco, « sans lien de parenté » insiste-t-il, a « un peu de mal à comprendre comment il fonctionne. Dans sa façon de faire, il se coupe de trop de personnes. Il n'y a pas qu'avec moi qu'il a eu des soucis. Posez-vous la question : est-ce qu'il aime les gens ? »
«S'il ne réussit pas, ce sera le drame de sa vie. Nous, on veut qu'il arrête», sa fille Caroline
Les gens, peut-être, même s'il déclare « plus je connais les hommes, plus j'aime mon chien. » Le milieu du football, où il a pourtant évolué comme président de l'AS Porto-Vecchio (2005-2013), pas du tout : « Le foot, ce sont des enculeries permanentes ! Le monde est composé de 50 % de gens tordus, le foot, c'est 98 %. »« Attachant », « compliqué » et « écorché vif » selon des proches, binaire aussi : « Il n'est pas gris, confirme Caroline. Avec lui, c'est blanc ou noir. Il était très impétueux plus jeune, il s'est calmé mais, parfois, cela ressort. »
Fousseni Diawara, ancien défenseur, en garde, lui, un bon souvenir : « J'ai joué en Corse, les gens y sont francs, sincères et, lui, il est corse. » Celui qui se voit « en moine-soldat » aime ferrailler, se nourrir des affrontements, notamment avec Jean-François Bernard, président de l'association du club tourangeau qui a eu « honte en lisant les insultes. Cela témoigne de son aptitude à entrer en conflit avec tous ses interlocuteurs. Entre nous, il n'y a plus de conflit car on n'a plus de relations. » Avec la municipalité, les ultras, aussi, c'est compliqué. Avec les médias, c'est à couteaux tirés, au point qu'il fit expulser du stade lors de la première journée de Championnat deux confrères de la Nouvelle République. Au téléphone, il trouve « bizarre » que L'Équipe lui consacre un portrait « le jour du match. Je ne suis pas paranoïaque mais je suis lucide. »
Une rhétorique complotiste (2), assez agressive, un côté Don Quichotte en totale contradiction avec sa pratique du bouddhisme : « Je dois apprendre à me maîtriser. » Il a encore du boulot, même si Pascal Bérenguer, ancien joueur de Tours devenu responsable des relations publiques, apprécie de travailler avec lui : « Il est attachant et atypique. Il vit les choses à fond. En tribune, ce n'est pas un président, c'est un ultra ! Quand on a gagné contre Auxerre, il est tombé dans mes bras, il s'est mis à pleurer. Je lui dis souvent "dans le foot, on ne peut pas tout maîtriser". »
Sa fille Caroline pointe justement le fossé entre sa réussite à la tête de Corsicatours (400 salariés, 60 M€ de chiffre d'affaires) et son échec avec le club (18e de L 2) : « S'il ne réussit pas, ce sera le drame de sa vie. Nous, on veut qu'il arrête. » Il y pense : « Pourquoi je suis venu à Tours ? Je ne sais pas mais, ce jour-là, j'aurais préféré me casser les deux bras et les deux jambes. Je reste car je n'ai pas fini et que cela ferait plaisir à certaines personnes que je parte. » Seul contre tous ou presque, encore une fois.
(1) « Ta mère, c'est une grosse pute. Ta mère devrait crever », après la rencontre Tours-Niort (0-0), il y a une semaine.
(2) « Il y a une conspiration entre la Nouvelle République et L'Équipe ! » avait-il déclaré au micro de beIN Sports après la défaite à Sochaux (1-2, le 18 novembre).